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МИСЛЕНЕ ДРЕВО

Ми робимо Україну – українською!

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Олександр Шульгин, меморандум уряду Франції, Париж, 3 серпня 1921

Переклад Георгія Потульницького

Paris, le 3 août 1921

La Mission de la République Ukrainienne à Paris a l’honneur d’attirer l’attention du Monsieur le Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères, sur trois questions :

1) L’affaire des fonds déposés par le gouvernement ukrainien dans les banques d’Etats des Empires centraux.

2) La situation actuelle de l’Ukraine et les aspirations de son gouvernement.

3) La politique dans l’Est de l’Europe

1) L’affaire des fonds. Par la convention conclue en 1918 entre l’Ukraine d’une part, et l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie, d’autre part celles ci s’engageaient livrer des articles de fabrication finie et notamment des machines agricoles en échange des quantités importantes de blé et des matières premières que l’Ukraine avait livrées aux Puissances Centrales. Ces dernières n’ayant pu remplir leurs obligations le Gouvernement Ukrainien leur accord à la permission d’acheter du blé et des matières premières dans l’Ukraine contre payement en argent comptant. Mais la population ukrainienne refusa d’accepter les billets de banques allemandes et autrichiens. C’est pourquoi le 10 Septembre 1918, les Puissances Centrales signèrent à Kiev avec l’Ukraine une convention pour l’achat de 1 600 millions de Carbovanetzses (monnaie ukrainienne) contre des sommes équivalentes en bons du Trésor et en espèces (marks et couronnes), toutes sommes déposées dans les banques d’Etat de Berlin, de Vienne et de Budapest.

A cette époque, l’Ukraine a en dépôt dans la banque allemande 400 000 000 marks et dans la banque austro-hongroise des bons du Trésor se montant à 158 400 000 couronnes.

La susdite convention portait pour l’Ukraine la signature du ministre du commerce de l’hetman [Pavlo] Skoropadsky et les fonds ont été déposés dans les dites banques par le gouvernement de l’hetman.

Il est connu qu’après l’armistice général une révolution du peuple ukrainien a obligé [Pavlo] Skoropadsky à abdiquer (14 décembre 1918). Le même jour, le gouvernement de l’hetman a remis ses pouvoirs entre les mains du Directoire, lequel représenté par son Président [Symon] Petlioura, est devenu l’ayant-droit sur les fonds déposés en Autriche-Hongrie et en Allemagne. Au reste, en 1919, le Directoire a, à plusieurs reprises, touché des acomptes sur les sommes déposées à la banque austro-hongroise. Mais, plus tard, les Puissances Centrales ont mis le séquestre sur les dépôts du l’Etat ukrainien.

Malgré cela, avec l’Autriche et la Hongrie, des conventions ont pu être obtenues suivant lesquelles ces puissances s’engageaient à payer au Directoire ukrainien une partie des valeurs déposées. A la suite de quoi, en mai 1920, 25 000 000 de couronnes hongroises ont été versées en Ukraine. Deux nouvelles conventions ont été signées, l’une et l’autre cette année, et les textes ont été remis à la Commission des Réparations.

En ce qui concerne l’Allemagne, aucune entente n’a pu être réalisée, pour les raisons que j’ai exposées dans les conclusions de mon mémoire du 24 Juin dernier.

Le gouvernement ukrainien a espéré obtenir cet argent avec l’aide de la France auprès de laquelle des démarches ont été faites dans ce but par mon prédécesseur le comte [Mykhaylo] Tyszkievicz. Le 26 Juin, j’ai eu l’honneur d’être reçu par M[onsieur] Perretti de la Rocca qui m’a dit qu’une note avait été adressée par le Ministère des Affaires Etrangères à la Commission des Réparations concernant les fonds de l’Ukraine déposés en Allemagne. Cette entrevue m’a laissé comprendre que les renseignements qui sont parvenues à Monsieur le Directeur des Affaires politiques étaient inexacts. La note en question devait contenir l’affirmation erronée que les fonds susdits étaient déposés en or comme garantie du traité de paix de Brest-Litovsk, ou du moins en vertu de ce traité.

M[onsieur] Perretti de la Rocca m’a dit aussi qu’en vertu du traité de Versailles, ces fonds devaient, après examen de la Commission des réparations, être rendus par l’Allemagne et gardés par cette Commission.

Nous sommes absolument d’accord sur le fait que l’Allemagne doit rendre ces fonds ; et nous avons maintes fois protesté contre l’attitude de ce pays qui détient des fonds appartenant a mon gouvernement et a lui seul. Mais nous osons espérer qu’après tous les renseignements que j’ai eu l’honneur de fournir eu Ministère des Affaires Etrangères le Gouvernement Français n’insistera par sur le question de la conservation des fonds, par la caisse de la Commission des Réparations.

Je crois de mon devoir d’attirer votre attention Monsieur le Président, sur l’effet que pourrait produire sur mes compatriotes l’initiative prise par la France d’une mesure qui les empêcherait une nouvelle fois de toucher un argent incontestablement dû à leur gouvernement. Le séquestre mis par l’Allemagne sur cet argent est justement considéré par nous comme un acte d’hostilité.

Il serait déplorable que l’attitude de la France pût être considérée de même par notre jeune République si profondément francophile.

En réalité les yeux et l’attention de l’Ukraine au sujet de ces fonds seraient que le Gouvernement Français, en reconnaissant au gouvernement ukrainien des droit précis sur ces fonds, acceptât le mandat de les obtenir de l’Allemagne et de les garder en dépôt, en tenant compte cependant que, selon une convention entre la France et l’Ukraine, une partie de cet argent devait nous être donnée pour les besoins immédiats de notre gouvernement et pour d’urgents secours a nos refugies.

2) La situation acteulle de l’Ukraine. Alors que le Gouvernement légal de le Russie était en porté par l’ouragan révolutionnaire et que son ancien chef, déguisé en matelot, s’enfuyait à l’étranger le Gouvernement légal l’Ukraine, quoique obligé par deux fois à franchir la frontière devant l’ennemi, a toujours conservé son existence et ses fonctions et n’a pas un instant cessé de remplir son devoir: Il dirige toujours la lutte à mains armées contre les envahisseurs et les pillards.

Les Gouvernement légal de l’Ukraine se compose:

Du Directoire qui est représenté par son président l’Ataman en chef Symon Petlioura, du Conseil des Ministres, qui a pour président M[onsieur] Viatcheslaw Prokopovitsch et pour vice-président M[onsieur] [André] Livitzky et le Ministre des Affaires Etrangères M[onsieur] [André] Nikovsky, de la Rada de la République, parlement provisoire dans lequel sont représentés tous les partis, les zemstwos, les coopératives etc., et dont le président est le professeur [Ivan] [Fechtchenko]-Czopivsky.

Le Gouvernement ukrainien a pour but : de délivrer l’Ukraine de l’invasion des troupes rouges de la Russie des Soviets, de rétablir l’ordre en Ukraine, de convoquer une Constituante.

On le voit: la première tache de notre gouvernement est de libérer le sol natal des bolcheviks. Le lutte contre ces derniers a commence à la fin de l’année 1917. Après quelques mois d’interruption (au moment de l’occupation allemande), cette lutte a repris quand l’Ataman en chef [Symon] Petlioura s’est mis à la tête des armées nationales (14 décembre 1918).

La guerre menée par M[onsieur] [Symon] Petlioura, comprend trois périodes :

En 1919, il combat, sans l’aide d’aucun allié, contre les bolcheviks en même tempe que contre [Anton] Denikine qui n’a pas voulu entrer en pourparlers avec le gouvernement ukrainien de façon à vaincre l’ennemi commun.

En 1920 (le 21 avril) le Gouvernement ukrainien signe une convention avec la Pologne et accordement à celle-ci commence une campagne contre les troupes de Soviets.

Après les préliminaires de Riga et la chute de [Piotr] Wrangel, les armées ukrainiennes se trouvent seules pour combattre les bolcheviks. N’ayant pas des armes non plus que des bataille, mais décide à la lutte a outrance, l’Ataman en chef [Symon] Petlioura ordonne une guerre de partisans. C’est ainsi que, sur le sol de l’Ukraine, la guerre contre les bolcheviks dirigée par notre gouvernement légal, est faite à l’heure actuelle par notre paye tout entière.

Loin de décourager les Ukrainiens, quatre ans de lutte sanglante contre les Russes moscovites n’ont fait qu’accroitre leurs sentiments patriotiques et exciter leur désir obstine d’indépendance nationale.

Les bolcheviks ne possédant enréalité que les grandes villes dans lesquelles il peuvent maintenir des garnisons. Les villes moyennes et plus encore les villages et la plaine échappent à leur pouvoir. Mais pour se débarasser de leur ennemis, il manque aux Ukrainiens des armes. Il leur manque aissi la puissance d’une organisation régulière.

Le Gouvernement ukrainien et son chef [Symon] Petlioura m’ont donné la grave mission de faire connaître a la France que, sans son aide matérielle, nous considérons aujourd’hui plus que jamais, la lutte comme extrêmement difficile et comme devant se prolonger longtemps encore en augmentant inutilement les morts sanglants et la ruine des richesses de mon pays.

Or, d’âpres ce qui m’a été a plusieurs reprises au Ministère des Affaires Etrangères, une aide matérielle ne pourrait pas nous être donnée directement par la France, pour cette raison principale que celle-ci ne disposait pas des crédits que nécessiterait une telle action. Mais par sa seule aide morale, la France peut aissi nous aider matériellement, en ce sens qu’elle peut nous faciliter l’obtention de fonds qui nous appartiennent et qui sont séquestres par les Allemands.

3) La politique dans l’Europe de l’Est. Une évolution des régimes des Soviets russes nous parait totalement impossible. En conséquence, il nous semble de toute évidence que ce régime de violence sauvage et d’aveugle destruction est appelé a s’effondrer brusquement. Qui le remplacera ? Notre connaissance de la Russie, notre documentation sur tous le faits qui se sont déroule dans ce pays et qui s’y déroulent encore, l’état d’esprit des émigrants russes qui sont an désaccord absolu entre eux, tout cela nous prouve qu’il n’y a cette heure aucune force russe qui soit capable de prendre et moins encore de tenir le pouvoir. A l’anarchie organisée dont nous voyons actuellement les effets terribles succédera fatalement une anarchie non organisée. Il n’est pas du impossible que de ce second système d’anarchie ne puisse sortir une force saine, appelée a exercer un certain pouvoir. Mais durant cette anarchie et même quand ce pouvoir sera réalise, la Russie sera incapable de retrouver toutes ses anciennes provinces. La reconstitution d’une Russie une et indivisible est a jamais impossible.

L’une des deux faits les plus remarquables dont l’Europe de l’Est a été le théâtre, depuis la grande guerre mondiale, est la reconstitution de la nation polonaise. Le second fait réside dans la volonté proclamée par la vaste partie ukrainienne de disposer elle même de ses destinées, volonte sans cesse manifestés par des votes solennels et par une lutte sanglante. Jusqu’ici la France ne s’est appuyée dans l’Europe de l’Est que sur le Pologne et sur la Roumanie. Ce groupement, si fort qu’il puisse être, ne pourra pas constituer un appui décisif pour la France tant qu’il ne se sera pas adjoint l’Ukraine. L’existence de la Pologne, placée entre une Russie de plus en plus orientée vers l’Allemagne et l’Allemagne elle-même, ne pourra être assurée sans l’existence d’une Ukraine robuste, grande et libre.

Par l’union de ces trois nations auxquels s’adjoindraient tout naturellement les pays riverains de la Mer Noire et notamment les Républiques du Caucase, la France aura dans le proche Orient un faisceau tout puissant d’alliés et d’amis. Elle sera en effet garantie contre la néfaste influence de l’anarchie russe et contre toutes les éventualités possibles en Europe centrale.

Le 21 avril 1920, le Gouvernement ukrainien a signé avec la Pologne un traité d’alliance par lequel la Pologne reconnait de jure l’Ukraine et renonce à toutes les terres ukrainiennes que se trouvent à l’est de ses frontières momentanées. D’autre part, le Gouvernement ukrainienne a conclu des arrangements avec nos frères du Kouban et nos amis du Don, ainsi qu’avec un groupement russe, présidé par M[onsieur] [Boris] Savinkoff, qui a formellement reconnu l’indépendance de l’Ukraine. Enfin, le Gouvernement ukrainien entretient les meilleurs relations avec ses grands voisins roumains et il semble près d’entrer en relations plus étroites avec les Républiques caucasiennes. En s’adressent aujourd’hui à la France, le Gouvernement ukrainien ne lui demande dans la question politique comme dans la question économique, que la toute puissance de son soutien moral. Au Ministère des Affaires Etrangères Monsieur [Emmanuel] Peretti de la Rocca et Monsieur [Fernand] Grenard m’ont dit maintes fois que la France était décidée à n’intervenir dans aucune affaire russe intérieur: et c’est une des raisons pour lesquelles elle prétend qu’elle ne peut nous aider en ce moment. Mais nous affirmons une fois de plus que les affaires de l’Ukraine n’ont rien à voir avec les affaires russes intérieures. L’Ukraine a proclamé son indépendance en 1917 et la gratitude ukrainienne n’oubliera jamais que c’est le représentant de la France auprès du Gouvernement ukrainien, Monsieur le Général [Georges] Tabouis, qui a salué le premier notre jeune République.

Il est facile d’établir que l’Ukraine est actuellement envahie par des troupes rouges, composées de Moscovites, de Lettons, de Chinois et de toutes sortes de gens étrangers en Ukraine. Or, le Gouvernement ukrainien ne démande au Soviets russes que de retirer de l’Ukraine ces troupes rouges. Et c’est précisément sur ce point que mon Gouvernement a l’honneur de solliciter le soutien moral de la France.

Alexandre Choulguine

Переклад Георгія Потульницького

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Друкується за примірником Державної Канцелярії УНР, машинопис / ЦДАВО України Ф. 1429. – Оп. 2. – Спр. 101а. – Арк. 6-14.

Переклад Державної Канцелярії УНР, машинопис / ЦДАВО України Ф. 1429. – Оп. 2. – Спр. 101а. – арк.126-129.


Опубліковано

Архів Української Народної Республіки. Міністерство закордонних справ. Дипломатичні документи від Версальського до Ризького мирних договорів (1919–1921) / Упоряд.: Валентин Кавунник. – Київ: Інститут української археографії та джерелознавства ім. М. С. Грушевського, 2016. – С. 422-426.